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L’apartheid et l’émergence de la world music


Street scene in Johannesburg with Nelson Mandela poster, une photo de Gregory Fullard (via Unsplash)

L’apartheid, un système institutionnalisé de ségrégation raciale et de suprématie blanche, a commencé en 1948 et a duré jusqu’en 1994. Ce régime a provoqué une forte opposition qui s’est manifestée de diverses manières : boycott, protestation non violente, résistance armée. La musique a joué un rôle important, que ce soit à l’intérieur du pays ou internationalement, et ce dès la fin des années 1940. Certains artistes se sont exilés, comme Miriam Makeba ou Hugh Masekala, d’autres ont tenté de résister à mots couverts, malgré la censure.

 

Pendant les années 1980 commence une conscientisation internationale : des artistes étrangers s’approprient la question, lançant une curiosité autour des musiques traditionnelles sud-africaines qui n’étaient pas connues en Occident à cause du boycott imposé sur les produits locaux. Un des premiers est Peter Gabriel qui a composé « Biko » en 1980 en hommage à l’activiste Steve Biko qui est mort sous détention policière en 1977. Au Nigéria, Sonny Okosun chantait déjà « Fire in Soweto » en 1978. Et il ne faut pas oublier Johnny Clegg, un sud-africain blanc, qui commence à s’intéresser à la culture des townships dès la fin des années 1960 quand il rencontre Sipho Mchunu avec qui il sortira de nombreux disques, d’abord sous leurs propres noms, puis avec le groupe Juluka. En 1986, Clegg crée Savuka, un groupe multiracial mêlant influences sud-africaines et européennes, tout particulièrement du folk celtique. Il avait développé une affinité certaine avec la culture zouloue, jouant de la guitare dans ce style et apprenant les danses traditionnelles. « Asimbonanga » est sans conteste son morceau le plus célèbre, rendant hommage à Nelson Mandela. Il est la coqueluche du public français qui l’a surnommé le « Zoulou Blanc » et de la classe politique locale en France.

 

C’est Paul Simon qui ouvre la boîte de Pandore en sortant l’album Graceland en 1986. Il avait reçu une cassette de mbaqanga et de township jive d’un ami et s’était passionné pour ces styles. Il rompt le boycott en travaillant avec des musiciens locaux comme Ladysmith Black Mambazo. Il est cependant fortement critiqué et considéré comme politiquement incorrect. En même temps, il offre une porte d’entrée vers ces musiques méconnues du public occidental. Graceland est un album précurseur du mouvement world music.

 

A partir de ce moment, de nombreux artistes ont été mieux diffusés dans le monde. La production discographique explose et des centaines de compilations et albums d’artistes divers inondent le marché. Le label anglais Earthworks sort la compilation Indestructible Beat of Soweto en 1985 tandis que le label américain Shanachie réédite de nombreux disques de Ladysmith Black Mambazo. Simon organise un Graceland Tour, avec la collaboration des musiciens en exil Hugh Masekela et Miriam Makeba ainsi que des artistes locaux.

 

A la même époque, en 1985, les Artists United Against Apartheid enregistrent la chanson « Sun City » pour protester contre les artistes européens et américains qui acceptaient d’aller jouer dans un hôtel de luxe situé à Sun City, soutenant ainsi la ségrégation. Le groupe avait été initié par Little Steven et rassemblait entre autres Bruce Springsteen, Miles Davis et Run D.M.C. Il faut également citer le morceau « Nelson Mandela » enregistré par le groupe The Special AKA en 1984.

 

En 1988, un concert est organisé à Wembley en l’honneur des 70 ans de Nelson Mandela qui est à cette époque toujours en prison. C’est l’époque des grands événements de « charity rock », des concerts donnés par divers artistes soutenant une cause commune. Ce concert, vu par six cents millions de téléspectateurs dans soixante-sept pays, forcera le gouvernement sud-africain à libérer Mandela plus tôt que prévu, en 1989. (ASDS)


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