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Musiques savantes – l’héritage arabo-andalou


L'orchestre arabo-andalou Chabab Tetouan en concert

Les musiques savantes du Maroc sont un héritage de la période médiévale où Al-Andalus était un pays arabe qui comprenait le Maghreb et une grande partie de la péninsule ibérique. Sa culture et sa musique étaient le résultat d’échanges fertiles entre les différentes élites de cet empire musulman qui relia l’Afrique du Nord et l’Europe pendant plusieurs siècles à partir de 711. La musique arabo-andalouse qui a vu le jour à cette époque est aujourd’hui encore la base de la musique classique du Maroc. On attribue la création de cette forme musicale, appelée nouba, au musicien Ziryab qui quitta en 822 la cour de Bagdad pour se rendre à Cordoue, capitale de la dynastie des Omeyyades. Lorsque les Arabes furent chassés d’Espagne en 1492, les pays du Maghreb et du Mashreq virent revenir ces populations et leurs richesses culturelles développées en Al-Andalus. Plusieurs termes existent pour désigner cette musique dans son ensemble. On parle d’andalou-maghrébin, de musique classique andalouse, d’arabo-musulman, d’hispano-arabe, et au Maroc de marocain-andalou. On l’appelle al-âla au Maroc, malouf en Tunisie, en Libye et à Constantine, gharnati à Tlemcen ainsi que dans certaines villes marocaines. Enfin, en Egypte et en Syrie, la culture arabo-andalouse se retrouve surtout dans les nombreux poèmes chantés, appelés muwashshah.

 

Un concert de musique arabo-andalouse se compose souvent d’extraits de plusieurs noubat (pluriel de nouba). Les noubat étaient à l’origine au nombre de 24, correspondant aux 24 modes ou tempéraments et aux 24 heures de la journée. Il en reste aujourd’hui onze au Maroc, douze en Algérie (plus quatre noubat incomplètes) et treize en Tunisie. Celles du Maroc sont très longues, se divisant en mouvements et pouvant durer plusieurs heures. Le chant y est souvent collectif, tandis qu’en Algérie il est individuel avec réponses d’un chœur. La nouba est construite sur un mode dont elle prend le nom. Des pièces instrumentales et vocales s’y succèdent selon un ordre déterminé. Un prélude libre, laissant une large place à l’improvisation ouvre la suite où se succèdent diverses pièces, notamment des poèmes célébrant l’amour, la nature, le vin, etc. La nouba se termine par une phase plus rythmée. L’orchestre de musique al-âla comprend généralement violon, rabab, oud, violoncelle, alto et percussions et un ou plusieurs chanteurs.

 

On appelle gharnati la musique arabo-andalouse telle qu’elle est pratiquée à Oujda et à Rabat. Le même mot désigne le répertoire savant de Tlemcen en Algérie. Ces musiques se sont répandues sur une partie du Maroc suite à des mouvements de populations juives marocaines et à l’installation d’Algériens au Maroc au début du 20e siècle. Dans ces régions, on joue donc les noubas algériennes, soit seize suites. Le chant se partage entre un soliste et les choristes-instrumentistes, la musique se jouant sur la vièle rabab, des violons et altos, des luths et des percussions. Le répertoire de la musique gharnati comprend également d’autres pièces, plus courtes que les noubat.

 

Au fil du temps se sont développés, sur ces bases arabo-andalouses, de nouveaux styles intermédiaires entre la musique savante et la musique populaire. L’arabe classique y fait place aux dialectes et la musique modale s’y assouplit. Au Maroc, le malhûn est ainsi une poésie chantée en arabe dialectal, propre aux corporations des artisans. C’est un style exclusivement masculin qui se pratique encore dans des villes comme Fès, Meknès ou Marrakech. Pour créer un malhûn, il faut un poète qui compose la poésie elle-même, un rapporteur ou conservateur qui recueille ce poème (éventuellement le transpose par écrit) et le transmet à un chanteur. Celui-ci, le cheikh, l’interprète souvent avec son propre accompagnement à l’oud ou au violon et avec le support éventuel d’un petit orchestre. Le chanteur peut utiliser les mêmes modes que ceux de la nouba. Mais au contraire de celle-ci, qui se joue entièrement sur le même mode, il peut, pour interpréter un malhûn, passer d’un mode à l’autre et utiliser ainsi les différentes humeurs et émotions associées à chacun de ces modes. Beaucoup de poèmes chantés mettent en scène des personnages auxquels arrivent des choses insensées, inimaginables dans la vie sociale marocaine. (BD)


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