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Cambodian rocks – la vague pop des années 1960 et 70


Svay Muoy Mek - un 45 tours de Sinn Sisamouth et Ros Sereysothea

Après l’indépendance en 1954, le roi Norodom Sihanouk encourage les arts et l’ouverture à la culture occidentale. Le pays connaissait déjà la variété française, de Charles Trenet à Edith Piaf, mais aussi la musique afro-cubaine comme le cha cha cha, par l’intermédiaire de disques importés depuis Cuba et l’Amérique du Sud mais aussi par les nombreux orchestres philippins qui jouaient cette musique dans les hôtels ou les bars. Sinn Sisamouth est un pionnier et est considéré comme une des grandes stars de l’époque. Souvent considéré comme « l’Elvis » local, il mêle les styles, combinant les influences françaises, anglo-saxonnes et latino-américaines avec les traditions, reprenant des chansons de Tino Rossi ou des Animals en créant de nouvelles paroles en cambodgien. Ces morceaux ne sont pas de pâles copies des originaux, l’artiste y ajoutant une saveur et des sonorités locales. Il a en effet réalisé une partie de son apprentissage de la musique en travaillant pour le Ballet Royal du Cambodge, et la pratique du mohori et du pinpeat a influencé son style de chant. L’autre grande star est Ros Sereysothea qui enregistre de nombreuses chansons en duo avec Sinn Sisamouth. Les thèmes des paroles sont souvent doux-amers : rupture, déception, tragédie, désespoir même si les rythmes sont joyeux.

 

À côté de ces grandes stars existe également une multitude de groupes pop ou rock. Il faut citer Baksey Cham Krong, un guitar band apparaissant à la fin des années 1950. Le groupe est fasciné par les formations anglo-saxonnes telles que les Shadows et les copie allègrement. Il s’adressent à un public jeune qui veut avant tout s’amuser.

 

À partir de 1965, la situation politique de la région se complique : les Américains débarquent au Vietnam et la frontière est souvent traversée par les Viet Cong qui veulent atteindre le sud du pays en évitant les troupes ennemies. Cette présence américaine influence la musique : leur radio est écoutée au Cambodge et le rock contamine les nouveaux groupes, comme le Drakkar Band qui joue une musique proche du hard rock. Il faut également citer Pen Ran, jeune chanteuse aux morceaux très pop, et Yol Aularong qui interprète une sorte de rock soul funk aujourd’hui considérée comme pré-punk.

 

Toute cette scène disparaît en un jour avec l’arrivée au pouvoir des Khmers Rouges le 17 avril 1975. Prônant une société nouvelle, basée sur l’agriculture, ils font table rase du passé, poursuivant tout particulièrement les intellectuels et artistes, considérés comme trop influents par leur lien de proximité avec le peuple. De nombreux musiciens ont ainsi été envoyés dans des camps de rééducation et n’en sont pas revenus. C’est le cas notamment de Sinn Sisamouth et Ros Sereysothea qui ont disparu sans laisser de traces.

 

En 1996 sort un album bootleg, Cambodian Rocks. Il sera d’une grande importance pour la redécouverte du passé et lancera un mouvement de revival. Des groupes comme Dengue Fever (aux États-Unis) et le Cambodian Space Project (au Cambodge) reprennent les chansons de l’époque et en composent de nouvelles dans le même style tandis que le réalisateur John Pirozzi raconte l’histoire de cette période dans le documentaire Don’t think I’ve forgotten. (ASDS)


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