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Kacapi et suling, du tembang sunda à la sunda pop


Ensemble de kacapi suling - Collectie / Archief Vintage

Genre typiquement sundanais, associé au souvenir mélancolique de l’ancien royaume de Pajajaran (disparu en 1579), le tembang sunda est un style de musique très populaire à l’ouest de Java. Le terme tembang désigne un type de poésie chantée assez formel, il est aussi appelé Cianjuran, ce qui signifie qu’il est originaire de la ville de Cianjur. Le genre est historiquement apparenté au gamelan, même si ce n’est pas à proprement parler un style de gamelan.

 

En plus des gamelans classiques, de type javanais, les Sundanais utilisent traditionnellement un « gamelan de chambre » appelé degung, utilisé pour accompagner le théâtre d'ombres wayang ou les danses. Le gamelan degung est un orchestre aux caractéristiques uniquement sundanaises, plus petit (entre 5 et 7 musiciens), et accordé différemment. Aux métallophones, gongs et tambours s'ajoute la flûte en bambou suling qui joue les variations et ornementations sur la mélodie et qui est typique du son de Sunda. Le degung est notamment utilisé pour jouer un genre particulier de musique contemplative. Pour l'anecdote, cette musique degung semble très prisée des touristes étrangers à Bali, car quand ils veulent acheter des cassettes de musique « locale », on leur vend souvent du gamelan degung.

 

Le répertoire du degung a été élargi à la musique populaire (notamment la musique de mariage) en ajoutant la présence du chant (ce que les traditionnalistes trouvent souvent inapproprié) en style cianjuran ou tembang, ou encore kawih (populaire, par opposition au tembang aristocratique). Accompagné de la cithare kacapi et de la flûte suling, il se compose de chansons au rythme assez souple, dérivé du répertoire pour gamelan. Dans les ensembles appelés kacapi suling, la flûte remplace souvent la ligne vocale, et interprète le répertoire de mélodies du tembang sunda.

 

Les approches tembang et kawih se distinguent par le niveau de liberté laissé aux compositeurs et interprètes en matière de textes, de tempo, de métrique et d’accordage. Le rythme du kawih est plus marqué (alors que le tembang est flottant et appelle à la contemplation et à la mélancolie) et utilise des vocalistes uniquement féminines alors que le tembang est mixte.  Beaucoup d’orchestres de chansons kawih ne possédaient pas à l’origine de gamelans mais les joueurs de kacapi ont appris à imiter le jeu et le son des orchestres, avant d’associer les deux dans le degung kawih.

 

Le genre sangkala degung s’est développé durant ce que l’on appelle le zaman kaset, c’est-à-dire l’âge d‘or des cassettes, qui ont permis une très grande diffusion de la musique. Dans les années 1990, le musicien Ismet Ruchimat a sorti une cassette appelée Degung Dedikasi avec des adaptations en style degung de morceaux occidentaux comme « Hotel California » des Eagles, ou « Imagine » de John Lennon. Ce sera un énorme succès et il formera plus tard le groupe Sambasunda, du nom d’un de ses morceaux.

 

Chez les jeunes Indonésiens, le son du gamelan est parfois vu comme un peu vieux-jeu et beaucoup s’en détournent au profit des sonorités occidentales, mais plusieurs musiciens cherchent à le maintenir au goût du jour. Henry Spiller, un des spécialistes de la musique indonésienne, compare cette situation avec celle de l’accordéon chez nous. Aujourd’hui la pop sunda continue le répertoire degung avec des instruments électroniques et des arrangements pop modernes et les albums de chanteuses comme Hetty Koes Endang, Nining Meida ou Detty Kurnia (produite par Makoto Kubota) ont rencontré un grand succès tant en Indonésie qu’au Japon. (BD)


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