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Soufisme et qawwali – à la recherche de l'amour divin


Nizamuddin Dargah: The soulful Qawwali par Joe Athialy (via flickr)

Le soufisme est un courant mystique dans l’Islam qui naît au 7e siècle alors que cette religion connaît ses premiers bouleversements avec l’expansion de la communauté musulmane et le contact avec d’autres civilisations. Dimension intérieure, le soufisme est la recherche de la pureté qui conduit à l’obéissance et à la confiance absolue en Dieu, une voie initiatique qui permet d’accéder au monde de l’esprit, loin du monde illusoire d’ici-bas. C’est un retour à une foi profonde et pure, un amour irrationnel, fondé sur la fusion entre l’individu et Dieu, allant jusqu’à l’extrême renoncement.

 

Le Pakistan connaît différentes formes de soufisme: récitations liturgiques dans le cadre du zikr, qawwali, musique de cour, poèmes mystiques et tradition des fakirs dans les mausolées des saints. Ces sanctuaires font partie intégrale de la vie religieuse et accueillent des musiciens itinérants lors de fêtes et pèlerinages, tout particulièrement dans la province du Sind. Le centre le plus important est celui de Shah Abdul Latif qui est décédé en 1752. Ses poèmes sont toujours interprétés aujourd'hui par les chanteurs qui y mélangent des histoires traditionnelles des provinces du sud.

 

La forme la plus connue de ces chants soufis est cependant le qawwali, qui a été diffusé mondialement par Nusrat Fateh Ali Khan. Il trouve ses origines au 13e siècle: l'avancée des armées mongoles pousse les lettrés musulmans d'Asie Centrale à émigrer vers des lieux plus sûrs comme le sous-continent indien. Cette diaspora s'est mêlée aux peuplades locales et les musiques ont fusionné. Le qawwali possède en effet des éléments turco-iraniens et indiens: la structure des hymnes est proche de celle des bhajans médiévaux hindous, les chants de louanges pour les dieux. Les textes par contre sont inspirés des traditions musulmanes et persanes.

 

Le nom d'Amir Khusrau (1253-1325) est inséparable de l'histoire du style. Ce poète, mystique, musicien, guerrier et courtisan est né à Delhi dans une famille d'origine turque et a créé le qawwali tel qu'on le connaît aujourd'hui, inventant une manière de chanter particulière pour transmettre un message religieux. Il a composé plus de cinq cent mille vers exprimant l'amour divin, l'attente de la rencontre avec dieu.

 

Le qawwali est interprété par un ensemble exclusivement masculin dont le nombre de membres peut varier. Divers chanteurs sont accompagnés de percussions (dholak ou tabla et battements de mains) et d'harmoniums portatifs qui ont été introduits dans la région au 17e siècle par les Portugais et qui ont progressivement remplacé la vièle sarangi. Les voix sont fortes, alternant solo et chœur, répétitions et improvisations et les rythmes sont accentués par de vigoureuses percussions et le battement des mains.

 

Ce style a toujours été populaire et dès les années 1940, il sort du contexte uniquement religieux à la demande d'un public désireux d'écouter cette musique dans d'autres circonstances, notamment dans les films. Après l'indépendance, les musiciens, faute de mécènes, cherchent en effet un nouveau public pour vivre de leur musique et la transforment progressivement. Les chanteurs deviennent plus virtuoses et acquièrent parfois un statut proche de celui des stars de la pop. Nusrat Fateh Ali Khan devient une vedette internationale, mais il n'est pas le seul. Les frères Sabri accèdent également au succès avec leur style très original de chant – empreint de mysticisme religieux - et de percussions. Différents groupes ont depuis pris la relève mais aucun n'a atteint le niveau de popularité des anciens maîtres. Il faut cependant noter le groupe de Rahat Fateh Ali Khan, le neveu de Nusrat, et Faiz Ali Faiz qui a sorti de nombreux disques sur le label français Accords Croisés, ne rechignant pas à des collaborations diverses (Qawwali flamenco, par exemple). Citons enfin la grande chanteuse Abida Parveen qui interprète des poèmes mystiques soufis dans une tradition différente du qawwali. (ASDS)


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