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La musique afro-cubaine et le jazz: aller-retours d’influences


Machito et Graciella Grillo - photo de William P. Gottlieb

Les rapports entre la musique de Cuba et celle des États-Unis sont très nombreux, et leurs relations ont commencé très tôt. Le jazz a eu une grande influence sur la musique afro-cubaine comme celle-ci a eu un impact certain sur le jazz, mais ces processus ont fonctionné par étapes successives et non comme des échanges constants.

 

Des contacts ont été rapidement établis entre les Caraïbes et les Etats-Unis, et on a vu les colons français fuyant la révolution haïtienne se réfugier à Cuba avant de rejoindre la Nouvelle-Orléans, encore française à l’époque. De nombreux musiciens cubains ont été plus tard s’installer à New-York, soit pour y chercher fortune, soit pour y aller enregistrer à une époque où il n’existait pas de studios à Cuba. De même Cuba est très rapidement devenue une destination de choix pour le tourisme américain, favorisant la construction d’hôtels de luxe, chacun avec sa salle de bal et son orchestre maison.

 

Il faut distinguer toutes ces étapes et les examiner dans leur succession pour comprendre l’ampleur du processus complexe qui a relié la musique des deux pays. De nombreux ouvrages ont été écrits pour décrire l’influence de Cuba sur le jazz, comme The Latin Tinge de John Storm Roberts ou Cuba and its music de Ned Sublette, mais nous nous intéresserons ici plutôt sur l’impact du Jazz sur l’île.

 

Les moments-clés de cette histoire sont le développement du jazz afro-cubain et la naissance du cubop. Au début du 20e siècle, le monde connaît une vague de musique « latine » qui culmine durant les années 1950 avec la mode du mambo. Dans la foulée de cette déferlante, la demande s’est développée aux États-Unis, et notamment à New-York, pour les orchestres latins, entre autres ceux de Tito Puente, Tito Rodriguez et Jose Curbelo, et bien sûr de Perez Prado, qui y ont apporté mambo et cha cha cha et ont ramené en retour au pays le jazz de Harlem. Plusieurs figures importantes ont servi de passeur entre les deux pays, comme Bebo Valdés, qui a enregistré ce qu’on considère comme le premier album de jazz cubain en 1952, Con Poco Coco. Son fils Chucho Valdés, fondera en 1973, avec Paquito D'Rivera, le groupe Irakere, un important exemple de fusion afro-cubaine.

 

Les percussionnistes Machito et Chano Pozo ont également eu un rôle capital dans l’évolution du jazz comme de la musique cubaine. Emmenés à New York par Mario Bauzá dans les années 1930, ils y rencontrent les nouvelles stars du bebop, et parmi elles le trompettiste Dizzy Gillespie qui se passionne pour les rythmes afro-cubains et lance la vague du cubop, qui mélange les audaces du bebop et les percussions des Caraïbes. Cette vague, et les collaborations avec Chico O'Farrill, Billy Taylor, Howard McGhee, Charlie Parker et Dizzy Gillespie, vont paradoxalement accorder aux percussions cubaines une légitimité qu’elles n’avaient pas jusque-là au pays.

 
Suite à ces échanges d’influences, une forme de jazz particulière va se développer à Cuba, indépendamment des musiques populaires et traditionnelles. Ce jazz afro-cubain se nourrira à son tour du mambo et du cha cha cha mais aussi plus tard de la salsa du Spanish Harlem, du merengue dominicain et du songo. De nombreux musiciens poursuivront cette aventure du jazz afro-cubain jusqu’aux années 1970 comme Mongo Santamaria, mais aussi plus tard comme Gonzalo Rubalcaba, Adolfo Guzmán, Dafnis Prieto, Ruben Gonzales ou Roberto Fonseca. Ces deux derniers bénéficieront de l’effet Buena Vista Social Club et obtiendront à nouveau une importante visibilité à la fin des années 1990. (BD)


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