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La nueva trova – poésie et révolution


disque de Carlos Puebla en hommage à Che Guevara

La fin des années 1960 a vu à travers le monde un intérêt renouvelé pour la chanson traditionnelle, en partie inspirée par l’envie d’associer des textes politiques ou revendicateurs à une forme musicale détachée des genres commerciaux. De nombreux mouvements de protestation ont à cette époque émergé à travers le monde et se sont cristallisés autour de plusieurs grandes causes. Les jeunes, et surtout les étudiants, furent au cœur des luttes pour les droits civiques et de l’opposition à la guerre du Vietnam, des campus de Berkeley à ceux de Nanterre.  Sur le plan musical, de nouvelles formes de protest songs voient le jour: le revival folk de Bob Dylan ou de Joan Baez aux États-Unis, la nueva cancion en Amérique Latine, le tropicalisme au Brésil, etc.

 

A Cuba, un mouvement de ce genre va se développer à partir de 1967 et sera baptisé nueva trova en référence à la trova du XIXème siècle et à sa tradition de « troubadours », auteurs-compositeurs itinérants s’accompagnant généralement à la guitare ou au tres. La nouvelle génération va reprendre le style dans les grandes lignes, en y ajoutant des éléments contemporains, notamment dans l’instrumentation, mais surtout en y ajoutant un contenu beaucoup plus politique. Les deux genres ont bien sûr évolué dans des contextes très différents. La nueva trova s’est développée dans le Cuba d’après la révolution et le régime de Fidel Castro a beaucoup encouragé ses artistes. Ceux-ci abordaient des thèmes qui avaient été ceux de la révolution: la lutte pour le socialisme, contre l’injustice, le sexisme, le colonialisme, le racisme, etc.

 

Les musiciens avaient choisi d’éviter les thèmes classiques devenus banals de la chanson d’amour pour aborder des problèmes d’actualité et des sujets « sérieux ». Les figures les plus importantes de ce nouveau style furent Silvio Rodriguez et Pablo Milanes. D’autres, parfois issus de la trova traditionnelle, ou du filin, les rejoindront, comme Carlos Puebla ou Joseito Fernandez. Le gouvernement mettra sur pied plusieurs festivals et soutiendra financièrement les artistes dont les textes faisaient l’éloge de la révolution ou faisaient le procès des États-Unis.

 

Paradoxalement, c’est ce soutien officiel, associé à la courte durée de vie de chansons basées sur des thèmes d’actualité qui causera le déclin progressif de la nueva trova. Les chanteurs contestataires chercheront ailleurs une musique plus en phase avec les luttes de l’époque, et moins perçue comme liée au régime.

 

Dans la foulée de la redécouverte des musiques cubaines amorcée par le projet Buena Vista Social Club, le répertoire de la nueva trova connaîtra un sursaut d’intérêt, surtout en dehors de Cuba. Les chants en hommage de la révolution, comme le célèbre « Hasta siempre, Comandante» dédié à Che Guevara, composé par Carlos Puebla, séduiront une génération de jeunes occidentaux pour lequel le Che était devenu un symbole nostalgique de révolte.

 

Aujourd’hui des artistes cubains s’inspirent à nouveau de cette tradition et sont parfois rassemblés sous le nom de novissima trova. Les textes sont toujours critiques mais les thèmes ont changé, et sont inspirés des données économiques et géopolitiques actuelles. Une nouvelle génération est ainsi apparue parmi laquelle il faut citer des artistes comme Santiago Feliú, Donato Poveda, Xiomara Laugart, Franck Delgado, Gerardo Alfonso, Pedro Luis Ferrer, Carlos Varela. (BD)


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