Instruments anciens, sons de la forêt et néo-folk
Danse , Musique électronique , Nouvelle musique traditionnelle , Chanson traditionnelle , Néo-traditionnel , Metal , Folk metal , Néo-folk
22 janvier 2025
Les Estoniens ont gardé un lien très intime avec la nature même si l’essentiel de la population vit dans les grandes villes. Beaucoup de concerts et festivals sont organisés dans des lieux isolés, sur une île au milieu d’un lac, sur la plage, dans la forêt… Certains parlent de néo-paganisme, d’autres artistes comme Maarja Nuut pointent plutôt vers les liens avec la nature similaires à ceux qu’on retrouve dans le shintoïsme japonais.
La création d’un département de musique traditionnelle au collège de Viljandi à la fin des années 1980 a contribué à l’émergence de musiciens et groupes qui s’inspirent du regilaul et des instruments anciens quasi oubliés pour créer une nouvelle musique, réinventant les chants du passé en les remettant au goût du jour, y ajoutant souvent des sonorités contemporaines, électroniques ou plus rock. Parallèlement s’est développé à Viljandi un festival de musique traditionnelle qui a lieu chaque année ; c’est devenu un des plus important des pays baltes et même nordiques.
Mari Kalkun est née en 1986 à Võrumaa, dans le sud du pays. Elle mélange cithare kannel, accordéon, guitare et piano à une voix envoûtante et s’inspire des traditions locales. Avec ses albums, elle nous emmène dans le cœur de la forêt et explore les liens entre la nature et le monde moderne, empruntant des extraits de textes runiques estoniens ou en langue võru et créant une musique teintée de magie et de mysticisme, tout en étant ancrée dans le présent avec une orchestration contemporaine. Elle apparaît également sur l’album Nukuu de la finlandaise Lau Nau.
Dans une lignée similaire, Maarja Nuut, chanteuse et violoniste, a toujours été plongée dans une ambiance musicale. Sa mère était dirigeante d’une chorale, l’encourageant à apprendre le piano et à faire des études musicales. Elle interprète les musiques traditionnelles baltiques en intégrant de l'électronique et des loops qu'elle crée avec sa propre voix et son violon, donnant à l’ensemble un côté intime, mystérieux et atmosphérique, aux franges de l’ambient et de l’avant-folk. Elle a sorti deux albums en collaboration avec Ruum (Hendrik Kaljujär), un musicien expérimental de la scène techno qui a apporté un élément électronique bien plus poussé que dans les compositions de Nuut en solo.
La lyre à archet talharpa, proche du jouhikko finlandais est l’instrument de prédilection de Puuluup qui crée un monde sonore assez unique, mêlant tradition et effets électroniques, aux franges de l’indie pop. Tuulikki Bartosik quant à elle innove avec son accordéon, s’inspirant des musiques traditionnelles du sud de l’Estonie. Ses compositions sont inventives et spontanées, invitant à des aventures musicales inhabituelles. 6hunesseq est un quatuor vocal qui s’accompagne d’instruments traditionnels comme le kannel. Les mélodies sont travaillées, chantées en polyphonies sur un fond sonore aux riches textures.
Les musiques de danse sont aujourd’hui rejouées par des groupes comme Trad ! Attack ou Svjata Vatra. Le premier combine folk, rock et électronique dans une musique très énergique. Il s’inspire des traditions anciennes mais les sonorités sont très actuelles et peuvent être qualifiées d’ethno-folk. Le second est un groupe estonien-ukrainien fondé en 2005 qui interprète des mélodies folk-rock de la Baltique et d’Ukraine. Les instruments sont assez inhabituels : un trombone ukrainien et une cornemuse estonienne produisent des sons particuliers, le tout augmenté de guitares et percussions. C’est un groupe qui crée des ponts entre cultures et entre les traditions anciennes et les musiques d’aujourd’hui.
Comme dans beaucoup de pays du monde, l’Estonie possède une scène de folk heavy metal. Des groupes appartenant aux différentes tendances du metal, allant du thrash metal au melodic death metal (et toutes les variantes intermédiaires ou parallèles), et intègrent des instruments traditionnels comme le kannel ou des cornemuses dans leur instrumentation. Les paroles des morceaux font souvent référence à l’histoire (médiévale) du pays, aux mythologies baltiques et nordiques et à la nature. Groupe de folk metal, Metsatöll s’inspire du passé médiéval, tout particulièrement la lutte pour la liberté du peuple estonien aux 13e-14e siècles. Les mélodies aux sonorités traditionnelles sont accompagnées par des instruments comme le kannel, les cornemuses et les flûtes. Ils ont notamment enregistré en collaboration avec le Chœur National Estonien, composé de 54 hommes, une œuvre de Vejo Tormis, Curse Upon Iron, basée sur des chants chamaniques et le Kalevala.
Dans la même veine, on peut aussi citer Raud-Ants, utilisant kantele et jouhikko, et mené par deux chanteuses, Eva Tolsa et Marion Selgall qui apportent un élément mélodique, alternant avec des passages plus metal. Leur répertoire s’est intéressé au passé, avec « Kui miä kazvolin kanainõ », un morceau en vote, une langue quasi éteinte. (ASDS)
À Médiathèque Nouvelle
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MO8120 Leana & Hartwin, Kodu Trad Records, 2019. Enregistrement 2018.
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MO8125 Kirile Loo, Saatus - Fate Alula Records, 1994.
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MO8150 Maarja Nuut, Une Meeles Maarja Nuut, 2016.
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MO8151 Maarja Nuut & Ruum, Muunduja 130701, 2018.
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MO8165 Svjata Vatra, Muutused / Zminy Nordic Notes, 2018.
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MO8035 Tuulikki Bartosik, Storied Sounds Nordic Notes, 2016. Enregistrement 2015.
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MO8066 Estbel, Saar Nordic Notes, 2016.
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MO8115 Johanna-Adele Jüssi, Kiilid Go' Danish Folk Music, 2012.
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MO8122 Mari Kalkun, Stories Of Stonia - Stoonia Lood Real World Records, 2023. Enregistrement 2022.
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MO8276 Trad.Attack!, Kullakarva / Shimmer Gold Trad.Attack, 2017.
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MO8140 Metsatöll & Estonian Nat. Male Choir, Curse Upon Iron Westpark Music, 2007. Enregistrement 2006.