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Chant choral du sud - polyphonies des Tosques et des Labs


Groupe d’homme chantant, dans la région de Skrapar, au sud-est de l’Albanie (photo Gerd 72 via wikipedia)
Particularisme national de l’Albanie, l’iso-polyphonie est une forme de musique vocale aux origines lointaines. Présente uniquement dans le sud du pays, elle est inscrite par l’UNESCO sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité

Un des styles musicaux les plus caractéristiques et les plus originaux de l’Albanie est la polyphonie vocale que l’on trouve au sud du pays, de l’autre côté de la rivière Shkumbin. Cette forme de chant, plus précisément qualifiée d’iso-polyphonie, est d’une grande importance pour le pays et est une grande source de fierté nationale. Elle raccroche en effet la culture du pays à ses origines historiques dans la civilisation illyrienne. Le lien lointain avec les Illyriens, qui peuplaient la région environ 1800 ans avant notre ère, confère au peuple albanais une identité à l’aura mythique et la gloire d’être les descendants d’une lignée remontant à la plus haute antiquité.


Plusieurs interprétations viennent confirmer ou contredire cette vision des choses. Les partisans de l’origine illyrienne de l’iso-polyphonie albanaise la considèrent comme un ancêtre de la polyphonie européenne, dérivée d’une forme de rituel sonore magique. D’autres chercheurs placent ses origines plus près de nous, et la font dériver des rites chrétiens byzantins, et notamment du son des cloches des églises de la région. Quel que soit le parcours de cette tradition, elle reste un phénomène unique en son genre et une orchestration inédite de la musique vocale.


Sa description comme iso-polyphonie vient du fait qu’à la différence de la polyphonie traditionnelle, on trouve dans le chant albanais (du sud) une organisation très stricte du rôle de chaque voix et le soutien de la mélodie par un bourdon, distinct de la mélodie mais la suivant pas à pas. Il existe deux styles principaux : celle des Tosques et celle des Labs. Chez les Tosques, le chant est réparti entre trois voix : la première, interprétée par un ou une soliste, est appelée le marrësi ou « le preneur », et la seconde, le kthyësi (« celui qui attend » ou « le rendeur ») lui répond dans un style haché, avec une tonalité différente, généralement plus basse. La troisième voix est un bourdon, iso, qui est généralement un chant continu sur une voyelle unique de strophe en strophe, et peut être assuré par une personne ou un chœur.


Chez les Lab, une quatrième voix, le hedhësi ou « le lanceur », vient compléter ces trois voix en les ornementant. Son chant émouvant et fragile, au vibrato prononcé, est souvent décrit comme un sanglot musical. Contrairement aux Tosques, qui accompagnent - ou entrecoupent – généralement le chant avec un petit ensemble instrumental appelé saze, la polyphonie lab est exclusivement vocale. Le bourdon y est également constant, mais enrichi de micro-variations tonales et découpé en syllabes.


Il existe d’autres différences entre les styles tosque et lab, les premiers donnent la possibilité aux hommes comme aux femmes de l’interpréter, alors que les seconds établissent des distinctions strictes entre les chants pouvant être exécutés par des groupes de femmes, des groupes d’hommes ou des groupes mixtes. Les deux ont par contre en commun une échelle pentatonique et des répertoires très lyriques, parfois épiques, souvent tragiques. (BD)


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