Mondorama

Cette musique est généralement interprétée dans un contexte familier, loin des concerts et autres événements officiels, par exemple lors de fêtes de famille ou dans les bars, principalement autour d’Addis-Abeba où se concentrent les musiciens. Si le begena est limité à l’ethnie Amahra, le krar et le masenqo sont aussi joués par les Dorzé, les Oromo et les Tigréens. Ces deux derniers instruments sont l’apanage des azmaris, des musiciens professionnels itinérants (qui seront abordés dans le chapitre suivant).

La lyre begena (ou bägänna) est aussi souvent nommée « harpe de David » et est considérée comme l’instrument des nobles, des moines et de la haute société. Selon la légende, elle trouverait ses origines dans la harpe que jouait le Roi David il y a 3000 ans. Elle était utilisée à l’origine pour accompagner la méditation et la prière mais elle n’est aujourd’hui plus jouée durant les offices. Elle peut cependant intervenir lors de célébrations religieuses mais en dehors de l’église.

Alemu Aga l’a popularisée et a enregistré de nombreux morceaux, et l’instrument a retrouvé sa place dans la société éthiopienne après son interdiction durant la période de la dictature (le Derg). De taille importante (plus d’un mètre de hauteur), l’instrument prend la forme d’une caisse trapézoïdale. Il comporte dix cordes en boyau de mouton qui peuvent être pincées ou grattées avec un plectre. Des lanières en cuir sont insérées entre les cordes et le chevalet, ce qui amplifie et altère le son, et provoque les vibrations bourdonnantes si caractéristiques de l’instrument. Les chants qui l’accompagnent peuvent être courts ou très longs et possèdent une certaine sobriété. Les textes sont tirés de la Bible, ou de recueils de proverbes et poèmes ; d’autres sont composés par le chanteur. Les paroles sont pétries de doubles sens et permettent de critiquer la société de manière voilée. (ASDS)