Du ryukoka au kayokyoku – l’occidentalisation des musiques japonaises
Pop , Années 1930 , Années 1940 , Années 1920 , Chanson populaire , Japon , Musique populaire , Ryukoka , Enka
20 juin 2024

Lorsque le Japon s’ouvre aux influences extérieures en 1868, débutant l’ère Meiji, le pays découvre les musiques occidentales. Celles-ci vont déteindre sur les traditions locales et au fil des années, les chansons vont évoluer. Le style qui en découle est désigné par le terme ryukoka (musique populaire), qui aura son heure de gloire jusqu’au milieu des années 1920 avant d’être en partie remplacé par kayokyoku, toujours utilisé aujourd’hui comme mot générique pour différents courants de la chanson populaire, de l’enka à la j-op.
En 1923, le grand tremblement de terre qui a détruit complètement Tokyo forme une rupture dans l’histoire du pays. C’est une période de grands changements dans la société, de migrations vers les grandes villes et d’une forte urbanisation. La musique et les divertissements populaires évoluent, délaissant le minyo traditionnel pour s’emparer des rythmes modernes du jazz et du blues. C’est l’époque de la première radiodiffusion (1926), des premiers enregistrements électriques (1928) et de l’établissement de labels de disques qui domineront le marché (Japan Columbia, Japan Victor, Japan Polydor, King Records) et aussi des premiers films parlants (1931). De nouveaux théâtres sont construits, hébergeant revues et vaudeville, tandis qu’apparaissent des salles de bal où des femmes étaient payées pour danser avec les hommes célibataires. Les orchestres y jouaient du tango, de la rumba, des musiques hawaïennes et du jazz, considéré en même temps comme moderne et décadent.
Les chansons en style ryukoka possèdent une structure occidentale, avec des rythmes venant des musiques européennes et américaines, mais la tonalité reste japonaise, parlant d’amour, de perte, de départs et de retrouvailles, tout comme l’enka qui sera son successeur après la Seconde Guerre mondiale.
Shinpei Nakayama est un des premiers compositeurs à écrire des chansons dans ce style, s’inspirant du minyo, suivi par Masao Koga. Une des stars de l’époque est le crooner Ichiro Fujiyama (1911-93) mais il n’est pas le seul. De nombreuses geishas comme Ichimaru et Katsutaro Kouta s’adaptent à l’air du temps et commencent à chanter devant des publics de théâtre, tout en enregistrant des disques. Ces chansons sont souvent considérées comme ayant une mauvaise influence, abordant des thèmes érotiques et décadents, avec une touche de grotesque et de macabre.
A partir de l’invasion de la Mandchourie en 1931, les textes deviennent de plus en plus patriotiques. Les ministères de l’Information et de l’Education s’impliquent dans la production des morceaux, censurant les textes et encourageant la propagande. La musique reste un mélange de sonorités japonaises et occidentales mais les fanfares sont particulièrement mises en avant, avec leur ton martial. De nombreux musiciens sont forcés d’écrire des chansons de guerre, surtout après 1941 et l’attaque de Pearl Harbour. Un thème récurrent est celui de la solitude du soldat sur le champ de bataille. Durant la Seconde Guerre mondiale, les salles de bal sont fermées et la musique occidentale est interdite, considérée comme celle de l’ennemi. Le jazz se joue encore mais dans la clandestinité.
Suite à la défaite et l’occupation du Japon par les troupes américaines, la situation se retourne complètement : la musique militaire est bannie et le jazz reprend une place prédominante. Le boogie-woogie tout particulièrement connaît son heure de gloire avec des compositions de Ryoichi Hattori, « Tokyo Boogie-Woogie » interprété par Shizuko Kasagi ou « Shamisen Boogie-Woogie » chanté par Ichimaru. Hibari Misora, chanteuse qui deviendra très populaire avec l’enka, commence sa carrière en 1949 avec « Kappa Boogie-Woogie ». Le style joyeux de la musique et les paroles positives étaient censées distraire des conditions de vie difficiles. De même, le mambo, le calypso, le cha cha cha et d’autres rythmes considérés comme exotiques deviennent très populaires. « Ringo no uta » de 1945, interprété par Michiko Namiki est un grand hit. Comme dans beaucoup d’autres pays, les années 1950 voient l’émergence du rock’n’roll, et les années 1960, la Beatlemania. Parallèlement, le ryukoka évolue vers un nouveau style, l’enka. (ASDS)
À Médiathèque Nouvelle
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MX4084 Senji Kayo King Records Compact (Gbr).
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MX4088 Glorious Echoes Of The Phonograph Victor Entertainment, 2011. Enregistrement 1928-1953.
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MX4407 Koume Akasaka, Minyo No Subete Columbia Japan.
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MX4089 Sweet Voices 1934-1942. Japan Swing Era, King & Taihei Coll. King Records Compact (Gbr), 1934-1942.
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MX4090 Swing Girls 1935-1940 Teichiku Records, 2011. Enregistrement 1935-1940.
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MX4897 Ichimaru, Ichimaru No Subete Victor Entertainment, 2005.
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MX4095 Japanese Popular Music - 1928-1933 - Pre War Vol. 1 Victor Entertainment, 2008. Enregistrement 1928-1933.
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MX4096 Japanese Popular Music - 1934-1937 - Pre-War Vol. 2 Teichiku Records, 2008. Enregistrement 1934-1937.
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MX4097 Japanese Popular Music - 1938-1939 - Pre-War Vol. 3 Universal Music Japan, 2008. Enregistrement 1938-1939.
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MX4098 Japanese Popular Music - 1940-45 - The War Years Columbia Music Entert., 2008. Enregistrement 1940-1945.
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MX4099 Japanese Popular Music - 1946-1948 Post War Vol. 1 Columbia Music Entert., 2008. Enregistrement 1946-1948.
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MX4348 Longing For The Shadow: Ryukoka Recordings, 1921-1939 Death Is Not The End, 2021. Enregistrement 1921-1939.
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MX4349 Is It Really Goodbye ? More Ryukoka Recordings, 1929-1938 Death Is Not The End, 2021. Enregistrement 1929-1938.
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MX5252 Rentaro Kita, Legendary Voices Gramoclub, 2013. Enregistrement 1937-1940.
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MX5549 Utako Matsushima, La Tanguista King Records Compact (Gbr), 1935-1960.