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Le shakuhachi, souffle et bambou


Moines komusô au temple Daikoku-ji de Kyoto (via wikipédia)
Parmi les instruments typiques du Japon, la flûte shakuhachi a une place très importante dans l’imaginaire du pays. Associée à la méditation, à la tradition, mais aussi au mystère, voire à l’espionnage, elle a été utilisée dans de nombreux styles et répertoires anciens comme contemporains.

Le shakuhachi est dérivé de la flûte en bambou chinoise traditionnelle, le xiao, qui est arrivée au Japon dès le 7e siècle. Le modèle actuel a pris sa forme quasi définitive aux environs du 16e siècle. Il est construit dans un pied de bambou, juste avant la racine, et est en moyenne long de 54 centimètres et demi. Ce chiffre a donné son nom à l’instrument, signifiant 1 shaku et 8 sun, deux anciennes mesures impériales. Il comporte cinq trous, quatre devant et un derrière, accordés selon une gamme pentatonique. L’embouchure ne comporte pas de bec, elle consiste en une ouverture taillée en biseau « contre » laquelle le musicien souffle, comme on le ferait dans l’embouchure d’une bouteille. Diverses notes sont obtenues en masquant partiellement ou totalement les trous, et en inclinant la flûte (et la tête) d’avant en arrière. La simplicité apparente de l’instrument permet toutefois un jeu extrêmement complexe et subtil, et rend possible une très grande variété d’effets.


Le shakuhachi, après avoir été un instrument de musique de cour, a été associé au bouddhisme à partir de la période médiévale. C’est notamment à la secte Fuke qu’il est le plus lié, et à ses moines-mendiants itinérants, appelés komusô (« prêtres du vide »). Ceux-ci ont fait de la flûte un outil spirituel et de son jeu une forme de méditation. Leur essor correspond à une période particulière du Japon, durant laquelle le gouvernement des shoguns avait sévèrement limité le droit au déplacement des citoyens. Seuls les komusô ont obtenu une dérogation à cette restriction, afin de pouvoir circuler et mendier librement leur subsistance. Ceci explique que le déguisement de moine (dont la tenue classique comporte un couvre-chef en forme de panier en osier, masquant tout le visage, et une robuste flûte de bambou pouvant servir de gourdin) a été très souvent utilisé par les espions, ceux de l’ennemi comme ceux du shogun, quand ce n’étaient pas les moines eux-mêmes qui monnayaient leurs informations. La légende veut que les pièces les plus difficiles du répertoire bouddhiste, le honkyoku, ont servi de test pour déterminer si un moine était un vrai komusô joueur de shakuhachi, ou un espion.


Le répertoire actuel pour shakuhachi est divisé en trois catégories : le honkyoku, pièces solistes d’inspiration zen, le sankyoku, dans lequel la flûte fait partie d’un ensemble, comportant généralement koto et shamisen, et enfin le shinkyoku, comprenant les pièces composées après la période Meiji, sous l’influence de la musique occidentale. Un répertoire contemporain s’est ensuite développé, au Japon comme à l’étranger, avec des ambassadeurs de l’instrument comme Gorô Yamaguchi, dont le disque A Bell Ringing in the Empty Sky (pour Nonesuch Explorer Records) est un des premiers à le faire connaître en Occident. Le compositeur Tôru Takemitsu a également écrit de nombreuses pièces pour shakuhachi et orchestre, parmi lesquelles Celeste, Autumn et November Steps. (BD)


 


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